L’OIPC a une nouvelle Secrétaire générale

 

Après avoir connu quelques turbulences, l’Organisation internationale de protection civile (OIPC), à laquelle nous avons consacré un article dans notre édition de décembre dernier, s’est donné une nouvelle Secrétaire générale en la personne de Madame Mariatou Yap. Nous la remercions d’avoir bien voulu nous recevoir au siège de l’Organisation.

 

En guise de préambule, rappelons que l’OIPC est une organisation intergouvernementale dont l’objectif est de contribuer au développement par les Etats de structures assurant la protection et l’assistance des populations ainsi que la protection des biens et de l’environnement face aux catastrophes naturelles ou causées par l’homme. Cela passe par le renforcement des capacités nationales, la formation, des audits et conseils, une assistance technique et la réalisation de projets humanitaires.

A ce jour l’OIPC compte 59 Etats membres, 16 membres observateurs (dont la Suisse) et 23 membres affiliés. L’Assemblée générale, constituée de tous les Etats membres, en est l’organe suprême et le Conseil exécutif (25 Etats) met en œuvre les décisions de l’Assemblée. Le Secrétariat permanent, basé à Lancy (Genève), est chargé de la gestion technique et administrative de l’Organisation.

 

Directrice de la protection civile du Cameroun, Mariatou Yap a été élue – grâce à une préparation exemplaire et avec le soutien du Président de la République Paul Biya – le 14 octobre 2020, au terme de la 24e session de l'Assemblée générale de l’OIPC, face à un concurrent libanais. Elle succède au Russe Vladimir Kuvshinov, démissionnaire. Au cours de son mandat de six ans, elle devra mettre en œuvre son plan d’action axé sur la réhabilitation, la redynamisation et la revalorisation de l’Organisation. Petit tour d’horizon… après une précision essentielle. Alors que nous parlons ici plutôt de sécurité civile et que la «Protection civile» est connue comme une formation spécifique dévolue à cette tâche, il faut comprendre la protection civile dans les pays membres comme l’ensemble des tâches vouées à la protection et à l’assistance des personnes et des biens. Celles-ci sont souvent dévolues aux corps de sapeurs-pompiers, d’obédience militaire ou non.

 

Reprendre au pied levé un tel poste à vocation planétaire, a fortiori depuis un pays étranger, doit être un rude challenge…

 

Oui et non. Oui, parce que je prends mes fonctions au moment où l'image de l'OIPC est l'objet de certaines controverses, conséquence de l’inadéquation de ses textes, très anciens, avec le contexte actuel d’une part et, d’autre part, avec un nombre élevé de membres observateurs, dont certains le sont depuis plusieurs années, parmi lesquels des Etats de la région d'Europe où l'OIPC a son siège. Toutes choses qui nécessiteront des réformes et des actions de lobbying.

Non, parce que j'ai longtemps côtoyé cette Organisation. Cela dit, ma formation de base de scientifique (géologie), ma qualité d'enseignante, les seize ans passés à la Direction de la protection civile avant d'en prendre les rênes en 2016 constituent un atout pour moi. A cette fonction j’ai été appelée notamment à assurer l’organisation générale de la protection civile sur l’ensemble du territoire national en liaison avec les administrations concernées, à mener des études sur les mesures de protection en temps de paix et en temps de guerre, à préparer des stages de formation, à coordonner les moyens mis en œuvre au service de la protection civile. J’avais aussi la responsabilité d’assurer les relations avec les organismes internationaux de protection civile tels que l’OIPC, ce qui a constitué un utile tremplin vers ma fonction actuelle.

 

Quels sont les principaux défis de votre action à venir?

 

Après une période un peu trouble, il s’agit de remettre les choses en place, d’installer un climat de confiance et de partage en convainquant tous les pays membres que le Secrétariat permanent est réellement à leur service. C’est absolument nécessaire si l’on veut poursuivre certaines réformes entreprises en les consolidant et en validant les étapes franchies. Ce défi nécessite une sensibilité permettant de percevoir les particularités et les besoins des interlocuteurs pour mieux les accompagner, car s’il y a des attentes et des tâches communes à tous les pays, il y a aussi de très grandes disparités d’un pays à l’autre et le fonctionnement des organes de protection civile relève souvent des réalités locales. Amener les autorités locales à prendre conscience de certains risques et de certaines lacunes relève aussi de notre mission.

 

Et les tâches essentielles?

 

Elles s’inscrivent évidemment dans le rôle premier de l’Organisation, à savoir renforcer les dispositifs et les capacités existant dans tous les pays membres. Dans nombre de pays, ces dispositifs, les planifications, la conscience même du risque sont notoirement insuffisants en regard de la situation et ce renforcement passe précisément par un accompagnement, une collaboration avec d’autres nations, tout en respectant les choix des uns et des autres; car il n’y a évidemment pas un «modèle» universel en la matière, d’autant que les conditions et les besoins peuvent être différents d’un pays à l’autre, comme déjà dit. Il faut aussi assurer une sensibilisation aux risques des populations ou de certaines catégories de celles-ci à divers niveaux, comme les communes ou les écoles.

 

La période que nous vivons a-t-elle un impact sur le fonctionnement de la protection civile?

 

Dans les pays où la protection civile est déjà bien opérationnelle, elle peut assurer des tâches supplémentaires en réponse à la situation sanitaire, tâches qui tendent à valoriser encore davantage sa vocation et ses acteurs. Ailleurs, la situation sanitaire peut sensiblement compliquer les choses face aux risques «classiques», surtout si les autorités locales n’ont pas pris pleinement conscience des lacunes de leurs dispositifs.

 

Quelque chose à ajouter?

 

J’aimerais insister sur ma volonté de créer un dialogue systématique et permanent avec les responsables de sécurité civile des Etats membres et de promouvoir l’entraide. Et ce n’est pas qu’une question strictement matérielle, étant donné que le partage de connaissances et de compétences contribue également au renforcement des capacités des Etats membres. La Suisse, qui nous abrite ici à Genève, en donne aussi un exemple avec la fourniture régulière de matériels divers et un encadrement sur place. Nous souhaitons d’autre part que les Etats observateurs deviennent membres à part entière pour une OIPC plus forte.

 

En guise de conclusion, on permettra à l’auteur de ces lignes de dire que, si Madame Yap a clairement manifesté sa volonté d’être à l’écoute de ses interlocuteurs, elle a fait la preuve de cette disponibilité en nous recevant et en répondant sans détour à nos questions. L’UGPS lui souhaite plein succès dans sa nouvelle et ambitieuse tâche.

 

Didier Fleck 

 

Source : Union Genevoise des Partenaires de la Sécurité

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